Très tôt, les dirigeants de la Révolution se sont rendus compte de l’importance vitale d’un redéploiement sur le sol français pour le succès de leur projet. C’est ainsi qu’ils ont eu l’idée, sous l’impulsion de Mohamed Boudiaf, de créer une Fédération du FLN en France, dont la principale mission au départ était de soustraire la communauté algérienne installée dans l’Hexagone de l’influence des messalistes du MNA incarné par le leader nationaliste Messali Hadj, et qui constituait alors un sérieux rival pour FLN sur le terrain de la lutte contre l’occupation.
Il faut rappeler que la guerre fratricide qui vont se livrer les groupes de choc du FLN et ceux de son rival par des « règlements de compte » très meurtriers va faire plus de 4 000 morts et de 12 000 blessés. La Fédération de France prend le dessus définitivement en 1958. Elle est alors dirigée par Omar Boudaoud, secondé par Ali Haroun.
Le FLN a, ainsi, à prendre de l’avance sur son rival, essentiellement grâce la multiplication des groupes de choc, constitués de fidayine aguerris, issus généralement de l’Organisation spéciale (OS) qui prêtent serment sur le Coran, et qui étaient déchargés de toute autre tâche, et exonéré de toute cotisation ou autre obligation. Ces groupes sont aussi dotés d’un service de renseignement et fonctionnent comme une organisation secrète, où seul le chef doit savoir où sont cachées les armes et les membres d’une cellule ne connaissent pas les autres groupes, et les hommes du commando ne connaissent pas le nom de leurs victimes.
Parallèlement aux groupuscules MNA, ces commandos de choc avaient comme cibles principales les policiers français, responsables des répressions et intimidations quotidiennes dans les quartiers algériens. Du 25 août au 27 septembre 1958, ses commandos exécutent en France 56 sabotages et 242 attaques contre 181 objectifs économiques, militaires ou politiques, sans recourir au terrorisme aveugle. Des attaques plus sélectives visent en 1960 et 1961 les agents de force de police auxiliaire, les harkis de la préfecture de police de Paris.
Le difficile défi que les membres la Fédération de France du FLN qu’ils eurent à relever, c’était de mener la guerre contre le colonialisme français sur le sol même de la France, et surtout de mener une guerre « sans armes ». C’est ainsi que la fédération eut également comme mission de tenter d’influencer les milieux intellectuels et politiques français, en les sensibilisant sur la question algérienne.
Cela dit, le rôle le plus important, car déterminant pour l’essor de la lutte armée, qu’aura joué la Fédération de France du FLN, durant cette période cruciale, c’est notamment dans la collecte de fonds (80% du budget de fonctionnement du GPRA provenaient des cotisations de l’immigration algérienne, selon plusieurs sources), l’achat des armes et des munitions, les contacts avec les réseaux de soutien et la mobilisation de la communauté algérienne qui culmina par les manifestations historique du 17 octobre 1961 qui eut des échos retentissants dans le monde entier.
Vu le coût très élevé pour l’approvisionnement en armes pour les wilayas en Algérie, la mission importante de la Fédération est de fournir au FLN et à l’ALN des fonds récoltés auprès des travailleurs algériens en France estimés par le ministère français du Travail à 250 000 d’anciens francs, (le montant de l’apport financier de 1955 à 1962 est de 40 milliards), transférés vers l’extérieur et, à partir de 1961, vers les wilayas d’Algérie par des réseaux spécialisés.
Selon des statistiques officielles, l’organisation comptait en 1956 plus de 8 000 membres, et grâce à l’amélioration du recrutement, le nombre de ses membres va atteindre le chiffre de 136 345 en 1960, en comptabilisant les 878 éléments de la Belgique et de la Sarre en Allemagne.
En janvier 1960, le Congrès de Tripoli, par reconnaissance de son rôle majeure dans la lutte de libération, promeut la Fédération de France du FLN en septième wilaya, il compte parmi les cinq membres représentants de la Fédération de France au CNRA.
Beaucoup de militants nationalistes ont joué des rôles prépondérants dans le combat mené par la Fédération de France du FLN : de Mourad Terbopuche qui créa la première cellule du FLN en France, à Mohamed Lebjaoui, qui fut le premier chef de la fédération jusqu’à 1957, remplacé par Omar Bodaoud, qui eut à assumer la responsabilité jusqu’à l’Indépendance, assisté d’Ali Haroune, désigné comme responsable politique de la fédération.
Plusieurs témoignages précieux sur cet épisode charnière de la guerre de Libération nationales ont été publiés. On cite notamment ceux écrits par Mohamed Lebjaoui, Ali Haroune, Omar Boudaoud.
Adel Fathi