Evocation de Mahdi El-Mahdi, l’un des militants actifs de la Fédération de France du FLN

Le village de Toudja, dans la wilaya de Bejaia, est connu pour avoir consenti des sacrifices incommensurables pour la libération de l’Algérie du joug colonial, à l’instar de toutes les régions montagneuses d’Algérie, d’Est en Ouest, du Nord au Sud. La liste officielle des martyrs de cette commune inscrits au sanctuaire érigé à l’entrée du village, porte le nombre de 556, sans compter les oubliés de l’histoire qui sont nombreux. L’armée française a semé la terreur dans cette région laissant des séquelles indélébiles dans la mémoire des habitants ayant vécu les affres de la guerre et qui ont légué à leur descendance des images atroces qui se transmettront inéluctablement de génération en génération jusqu’au jour dernier.

Aujourd’hui, dans cette contribution, nous allons évoquer la mémoire de l’un des dignes fils de Toudja qui a milité intensément au sein de la Fédération FLN de France durant la Révolution. Il s’agit de Mahdi El-Mahdi dit El-Mahdi Naïth-El-Mahdi, né le 26 décembre 1931 à  Toudja (wilaya de Bejaia), fils de Mahdi Salah dit Salah Oulmahdi et de Aït-Larbi Tata. La famille Mahdi que l’on appelle aussi « Aïth-El-Mahdi » ou « Ilmahdyen » ou encore    « Araw Oulmahdi », est, selon de nombreuses sources crédibles, l’une des principales familles conservatrices qui se sont fixées dans la zone montagneuse de Toudja (tribu des itsoudjen) depuis longtemps, probablement plus de six ou sept siècles. Son père, Salah Oulmahdi était un homme pieux, modeste et d’une grande sagesse. L’une de ses sœurs s’était mariée avec Cheikh Larbi Cherif, nationaliste invétéré, connu pour son érudition en sciences religieuses, membre de l’Association des Oulémas Algériens. Ce dernier est en outre l’oncle paternel de l’homme politique algérien Hachemi Cherif, né le 5 octobre 1939 à Toudja et décédé le 2 août 2005, après avoir été membre fondateur du PAGS, créé en 1966, puis président du MDS, fondé en 1996. La famille Cherif est originaire du petit hameau d’Attallah (commune de Toudja) qui a donné à la révolution six maquisards parmi lesquels cinq (05) sont tombés au champ d’honneur. Si El-Mahdi a reçu comme sas nombreux frères et sœurs la meilleure éducation possible, empreinte de foi et de patriotisme.   

Après avoir fréquenté l’école de Toudja pendant tout le cycle primaire, Si El-Mahdi avait quitté Toudja très jeune en 1947 (à 16 ans) pour se rendre en France, précisément à Saint-Fons (Lyon). Dans cette ville qui comptait déjà à l’époque un grand nombre de ressortissants originaires de son douar, il a travaillé dans les usines du groupe chimique et pharmaceutique « Rhône-Poulenc ». Durant son séjour en France, il revenait régulièrement à Toudja durant les congés annuels, sachant qu’il était très attaché à sa famille. Bien avant la Révolution, soit vers 1952, il adhère au PPA/MTLD au sein duquel il acquiert une solide formation politique qui lui a permis de se forger un caractère de militant nationaliste prêt à toutes épreuves. En plus, Si El-Mahdi était un bel homme, toujours soigné dans son habillement, d’une correction exceptionnelle et d’une éducation raffinée. Il était sobre discret et d’un tempérament calme inspirant confiance et respect. Aussi, dès le déclenchement de la Révolution, il n’avait hésité un seul instant à s’intégrer dans les premières cellules formées par la Fédération de France du FLN dans le but de rassembler les émigrés et de les mobiliser pour mener la lutte de libération nationale sur le territoire de l’ennemi. Compte tenu de son engagement indéfectible pour la cause nationale et de sa forte personnalité, Si El-Mahdi a rapidement gravi les échelons de la hiérarchie mise en place à l’époque en occupant de nombreux poste d’encadrement au sein des groupes de choc, avant d’être nommé Chef de secteur. Durant toute cette période, il a organisé et participé à de nombreuses actions mémorables contre le MNA et contre les infrastructures de la puissance coloniale et ses différents services de répression.

Identifié et activement recherché par la police française, il a fini par être arrêté en 1961, et après avoir subi des sévices inqualifiables, il a été emprisonné à la maison d’arrêt de St Paul (Lyon) en compagnie d’autres frères de combat parmi lesquels on peut citer Gherbi Moussa dit Si Moussa (encore en vie), fils de Cheikh Saïd Ougherbi (Imam de la mosquée de Toudja de 1924 à 1954) et Abou Abdellah Saïd, originaire de Bouira. Ces deux derniers étaient incarcérés avec lui dans la même cellule. Si El-Mahdi a rejoint l’Algérie dès sa libération de prison après le cessez-le feu le 19 mars 1962. Après avoir contribué pendant quelques mois, à la mise en place de l’administration communale à Toudja au lendemain de l’indépendance, il s’installe à Alger où il a d’abord travaillé comme délégué commercial jusqu’à la fin du mois d’avril 1963. Entre temps, il s’était marié à Toudja le 26 novembre 1962 avec Bencheikh Taous, fille de Bencheikh Mohand Amokrane dit Si Mohand Ou-Chikh, un homme honorablement connu dans tout le douar de Toudja. Sous la pression de ses anciens compagnons de la Fédération de France qui connaissaient parfaitement ses qualités humaines et son amour pour la patrie, il est incorporé le 1er mai 1963 dans les rangs de l’ANP au sein de laquelle il a activé jusqu’à son admission à sa retraite le 1er juillet 1988, avec le grade de Capitaine auquel il avait été promu le 1er novembre 1984. Il a vécu sa retraite entre Alger et Toudja où il a pu réaliser le premier bain maure de notre village. Il nous a quittés le 12 février 2012 à l’âge de 81 ans après avoir accompli dignement sa mission vis-à-vis de son pays et de sa famille.

                                                             Le Moudjahed Aïssa Kasmi

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